Wednesday, August 7, 2013

Parachat Choftim – Tamim Tiheye

La Thora nous enjoint : « Conduis-toi avec candeur devant Hachem, ton D. » Rachi explique que l’on doit accepter ce qu’Hachem nous donne sans tenter de prédire le futur. Il faut tout accepter avec amour et candeur. Le ‘Hafets ‘Haïm déduit du verset que cette attitude est préconisée dans le rapport avec D. mais pas dans les relations humaines. Dans ses interactions avec autrui, l’on doit faire preuve de beaucoup de sagesse et de réflexion et ne pas se laisser duper par les personnes malhonnêtes. Il nous donne l’exemple de Yaakov Avinou, appelé « ich tam – candide » qui faisait pourtant preuve de beaucoup de ruse dans ses relations avec Lavan. Un jour, plusieurs Bné Thora se plaignirent au ‘Hafets ‘Haïm d’avoir été escroqués par des commerçants malhonnêtes d’une large somme d’argent. Il leur cita ce passouk et remarqua qu’ayant passé plusieurs années en Yéchiva, ils s’étaient habitués à se conduire avec candeur envers Hachem. Leur erreur était de penser qu’il était possible de se comporter de la même façon avec autrui . Cette leçon du ‘Hafets ‘Haïm paraît tout à fait logique, mais elle se doit d’être conciliée avec la mitsva de « betsédek tichpot eth amitékha » - l’obligation de juger l’autre favorablement, même si nous avons l’impression qu’il a agi de façon incorrecte. Comment pouvons-nous juger favorablement quelqu’un dont nous soupçonnons la droiture ?! On pourrait répondre tout simplement qu’il faut lui accorder le bénéfice du doute, tout en prenant les précautions nécessaires pour éviter de subir un dommage, dans l’éventualité où cette personne serait malhonnête . Cette façon de faire comporte deux problèmes : tout d’abord, il est presque impossible une attitude aussi ambivalente vis-à-vis d’une même personne – peut-on réellement juger autrui favorablement, en toute sincérité, tout en le traitant avec méfiance …? D’autre part, il semble difficile d’admettre que la Thora puisse ordonner d’accorder le bénéfice du doute aux gens que l’on a de bonnes raisons de considérer avec suspicion. Les Richonim écrivent que l’exigence de juger favorablement n’est pas uniforme ; elle prend en compte les différentes catégories de personnes . Il y a le « tsadik », le « benoni », le « racha » et le « eino makiro » (l’inconnu). Le tsadik est celui qui ne commet quasiment jamais de faute – il convient de le juger favorablement même si son acte semble commander une interprétation négative. Le benoni est celui qui, en règle générale, évite de fauter, mais qui trébuche de temps en temps – nous devons le juger du bon côté dans les cas où son action peut être perçue autant négativement que positivement. Par contre, lorsque ses agissements semblent négatifs, nous n’avons pas l’obligation de lui accorder le bénéfice du doute . Le racha faute régulièrement et c’est pourquoi nous ne sommes pas obligés de le juger favorablement, même lorsque son acte semble positif. En effet, rabbénou Yona estime que l’on doit le juger défavorablement ! Le eino makiro est celui que nous ne connaissons pas – il n’existe aucune obligation concernant la façon de le juger . Cependant, ni la Thora ni ‘Hazal ne font allusion aux directives ci-dessus – la Thora ne fait aucune différence entre les diverses personnes, elle demande simplement de juger son prochain favorablement, ce qui implique que cette obligation s’applique de façon égale à tout Juif. D’où les Richonim ont-ils déduit de tels ‘hiloukim entre les différents types de personnes ?! Mon rav, le rav Its’hak Berkovits chlita explique que la mitsva de juger l’autre favorablement ne nous oblige pas à considérer chacune de ses actions de manière positive, irrationnellement, mais plutôt à les interpréter de façon logique, raisonnable et équitable. En effet, on peut avoir tendance à juger autrui durement, injustement. La Thora nous rappelle que cela est erroné, mais n’exige pas de nous un raisonnement illogique. Ainsi, la raison pour laquelle les Richonim établissent plusieurs guedarim sur les différentes personnes est claire : en ce qui concerne le tsadik, même s’il fait quelque chose qui semble être une avéra, il est tout à fait normal de supposer qu’il n’a rien fait de mal. Par exemple, si l’on voit quelqu’un que l’on sait très rigoureux sur la nourriture cacher, entrer dans un restaurant non-cacher, on supposera naturellement qu’il n’y va pas dans le but de manger un aliment non-cacher. Et, même si on le voit mettre de la nourriture en bouche, il est plus probable qu’il ait eu besoin de manger pour avoir la vie sauve et qu’il lui était alors permis de manger cet aliment non- cacher. À l’opposé, quand un racha fait quelque chose de positif, il paraît logique qu’il existe une façon négative d’interpréter son comportement. Le même raisonnement s’applique aux autres catégories – lorsque le bon sens veut que l’on juge l’autre favorablement, la Thora nous ordonne de le faire, mais quand ce n’est pas le cas, il n’y a aucun impératif de la Thora d’accorder le bénéfice du doute et il y a même parfois une obligation de juger son prochain négativement. Selon cette explication, nous pouvons concilier la mitsva de juger favorablement et l’enseignement du ‘Hafets ‘Haïm selon lequel il ne faut pas être naïf. La Thora ne nous demande pas d’être naïf, mais plutôt d’être réaliste et elle nous dit parfois que nous devons juger l’autre défavorablement. C’est pourquoi, lorsque, par exemple, nous faisons du commerce avec les gens, la mitsva de « betsédek tichpot » nous enseigne qu’il ne faut pas être naïf, mais considérer l’autre justement et avec exactitude. Comme nous l’avons noté plus haut, il est important de se souvenir qu’agir de la sorte n’est pas une mince affaire – notre tendance naturelle peut nous pousser à juger l’autre injustement. C’est une erreur, nous dit la Thora ; il faut tenter de traiter les gens équitablement.

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