Sunday, October 13, 2013

Parachat Vayéra – Utiliser le bien pour le bien

La paracha commence par le récit du ‘hessed incroyable qu’Avraham Avinou fit avec les trois anges. Tout de suite après, on nous relate la descente des anges à Sodome ainsi que la destruction de la ville qui suivit. Le rav Yaacov Kamenetsky zatsal fait une remarque intéressante quant à la juxtaposition de ces deux incidents ; tous deux mettent l’accent sur la hakhnassat or’him (l’accueil réservé aux invités) . L’histoire d’Avraham est l’exemple type de l’attitude à avoir concernant harkhnassat or’him et la façon optimale de subvenir aux besoins des invités. Nous voyons comment Avraham met sa santé de côté et n’épargne aucun effort pour mettre ses invités le plus à l’aise possible. Immédiatement après, la Thora nous mène vers la ville de Sodome et montre l’antipathie de ses habitants pour cette même mitsva, la hakhnassat or’him. Nous voyons que la vie de Loth fut menacée parce qu’il nourrit et logea des visiteurs étrangers. Pourquoi la Thora insiste-t-elle sur le contraste marqué entre Avraham et les habitants de Sodome ? Le rav Kamenetsky propose une réponse basée sur un autre aspect de l’épisode de Sodome. Hachem dit à Avraham qu’Il prévoyait de détruire Sodome à cause du manque total d’égards envers autrui qui y régnait. Avraham s’inquiéta infiniment pour ce peuple de mauvais et invoqua Hachem de façon si énergique qu’il fut obligé d’introduire sa requête en demandant à Hachem de ne pas se fâcher du fait qu’il parle avec une telle franchise. Le rav Kamenetsky explique que la Thora nous montre une facette du niveau incroyable d’Avraham dans le ben adam la’havéro (les relations entre un homme et son prochain). Il écrit qu’en général, lorsqu’une personne excelle dans un trait de caractère, elle est particulièrement exigeante quant au comportement des autres personnes dans ce domaine. Par conséquent, elle a tendance à les juger très sévèrement s’ils lui semblent montrer une faille dans cette qualité. Il donne l’exemple d’un homme qui fait très attention à manger du pain à séouda chelichit (troisième repas du Chabbat). Il aura tendance à considérer ceux qui se contentent de manger des fruits pour séouda chelichit de façon très catégorique. La Thora juxtapose l’épisode montrant la grandeur de la hakhnassat or’him d’Avraham et la position abjecte de Sodome à ce sujet, puis elle montre comment, malgré tout, Avraham plaida en leur faveur et supplia Hachem de juger Sodome avec miséricorde. Cela montre qu’Avraham ne tomba pas dans le piège du yétser hara (mauvais penchant) qui nous incite à juger autrui avec rigueur dans nos domaines de prédilection. En dépit de l’immense fossé entre son ‘hessed et celui de Sodome, il se soucia énormément de leur bien-être. Nous apprenons de l’explication du rav Kamenetsky qu’il n’est pas facile de considérer favorablement les faiblesses d’autrui dans les secteurs qui sont nos points forts. Pourquoi est-ce si difficile ? Quand une personne excelle dans une compétence, il lui est très difficile de comprendre comment d’autres personnes peuvent être moins méticuleuses dans ce domaine. Par exemple, si quelqu’un est très ponctuel, il aura beaucoup de mal à s’expliquer comment ses camarades peuvent être constamment en retard. Il est évident pour lui que le fait d’être retardataire témoigne d’un manque de considération vis-à-vis d’autrui. Sa avoda (« travail », efforts à accomplir) consiste à admettre que chacun a des points forts différents et qu’il existe certainement des domaines dans lesquels il est bien plus faible que l’autre. De plus, il lui faut se souvenir de la michna dans avot qui nous dit : « Ne juge pas ton prochain avant de te tenir à sa place ». Cela nous enseigne que les traits de caractère de l’individu sont basés sur sa vie et qu’il est alors impossible de juger l’autre, car nous ne savons pas comment nous aurions réagi si nous avions été dans son cas. En intériorisant cet enseignement, on peut reconnaître que chacun a ses propres points forts et ses propres lacunes et qu’il ne convient donc pas d’être contrarié des imperfections des autres dans ses propres domaines de prédilection. Il existe un autre exemple montrant la grandeur d’Avraham dans ses relations avec d’autres personnes qui se situent à un niveau inférieur au sien. Au début de la paracha, la Thora décrit en longueur le délicieux repas qu’Avraham proposa à ses visiteurs. Le rav Issakhar Frand chlita souligne qu’Avraham lui-même était certainement peu intéressé à manger de tels mets. Néanmoins, il n’imposa pas son niveau personnel de perichout (éloignement du monde physique) à ses invités et n’épargna aucun effort pour leur servir un plat délicieux. Le rav Frand décrit comment l’une des plus grandes figures des générations récentes excella dans ce domaine, celui de ne pas imposer ses propres exigences aux autres ; dans le réfrigérateur du rav Moché Feinstein zatsal se trouvaient divers condiments, comme des sauces goûteuses… Il est évident que le rav Moché Feinstein lui-même n’accordait pas de grande importance à l’ajout de telles sauces pour agrémenter son repas – il vivait à un autre niveau, où de tels plaisirs physiques étaient insignifiants. Pourtant, il n’infligeait pas aux autres un tel niveau. Il existe plusieurs façons d’imposer ses propres desiderata à autrui de manière négative. Par exemple, quelqu’un peut être très propre et soigné, ce qui est évidemment une qualité permettant de vivre selon un séder (ordre). Cependant, il est fort probable qu’à un moment dans sa vie, cette personne soignée sera dans une situation où elle devra s’accommoder avec d’autres personnes, comme son conjoint (sa conjointe), ses enfants ou un camarade de chambre. Souvent, ces autres personnes n’aspirent pas à une propreté aussi rigoureuse dans la maison. Cela peut la contrarier, car elle souhaite que l’endroit soit rangé et nettoyé selon ses propres « normes de propreté ». Voilà comment l’on peut imposer sa façon de faire aux autres, ce qui semble être un comportement injuste vis-à-vis d’autrui. Une personne maniaque doit plutôt accepter que les autres puissent ne pas garder la maison aussi propre qu’elle le voudrait. Si elle se sent incapable de vivre correctement dans de telles conditions, elle doit se charger personnellement de maintenir la propreté de la maison selon ses impératifs. On pourrait parler longuement de la grande bonté d’Avraham Avinou. Le rav Kamenestky nous enseigne un autre aspect de ses relations ben adam la’havéro extraordinaires – il n’imposait pas ses exigences aux autres personnes et ne les considérait pas de manière stricte. Puissions-nous mériter d’utiliser nos bonnes midot (qualités) uniquement pour le bien.

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